Depuis cinq ans, Jeunes Textes en Liberté observe et dénonce des violences systémiques qui frappent les auteurices de théâtre. La crise de la Covid19 a révélé au grand jour une précarité structurelle longtemps ignorée, mettant en lumière des dysfonctionnements profonds du secteur théâtral. L’absence de revenus minimum garantis place les auteurices – souvent isolé.e.s, dans une situation de vulnérabilité extrême.
Cette précarité s’accompagne d’une méconnaissance généralisée de leurs droits et de la législation, les rendant plus malléables. Les auteurices naviguent dans un labyrinthe juridique complexe sans accompagnement, subissant des abus, faute de connaître leurs prérogatives. Et même lorsque celles-ci sont connues, les moyens de pression restent rares.
Les équipes artistiques peuvent exercer une violence symbolique en bridant la créativité des auteurices lors de commande. Iels s’approprient parfois illégitimement des droits d’adaptation (et par là des droits d’auteurs), dénaturant l’œuvre originale sans consultation ni rémunération équitable. Cette captation du travail créatif révèle un déséquilibre flagrant des rapports de force.
La banalisation du titre d’auteur – où « tout le monde peut être considéré comme « auteur » » – érode les droits de représentation légitimes et dilue la problématique du statut. Cette inflation artificielle contribue à dévaloriser le travail spécialisé de l’écriture théâtrale et à justifier des rémunérations dérisoires.
Face à ces violences, il est crucial de rappeler que l’auteur demeure le créateur premier de l’œuvre dramatique. Son rôle ne se limite pas à fournir un texte, mais consiste à concevoir un univers dramaturgique complet. Protéger les auteurs, c’est préserver la diversité et l’originalité de la création théâtrale contemporaine.
Anthony Thilbault et Penda Diouf