Retour aux actualités

Hommage à Colette Nucci

En 2006, quand, au nom de la SACD, j’ai eu l’honneur de remettre la médaille Beaumarchais à Colette Nucci, directrice du Théâtre 13 à Paris, j’avais écrit un petit texte pour elle intitulé Madame OUI ! Parce que c’était cela Colette un grand OUI, un accueil, une écoute attentive et une ouverture d’esprit très rare. Déjà elle oeuvrait dans son théâtre à garder la multiplicité des points de vue, des âges, l’équilibre des sexes, qu’on entend si haut et si fort aujourd’hui mais qu’elle, elle pratiquait naturellement comme M Jourdain fait de la prose.
Bien sûr ce OUI si franc pouvait aussi se transformer en NON tout aussi ferme et direct. Car c’était une des rares directrices de théâtre à oser te dire droit dans les yeux « tu sais ce n’est pas très bon ce que tu fais là » ou « non, ce texte ne tient pas la route » ou « ce spectacle n’est pas fini », mais ses critiques franches n’entamaient en rien son amitié ou sa curiosité envers la personne à qui elles s’adressaient. Avec Colette on avançait, toujours.

J’ai eu aussi la joie de la connaître en tant qu’actrice dans ma pièce Signé Pombo ou dans la peau de Franco qu’elle a jouée magnifiquement en France et en Espagne dans les deux langues. C’était une camarade de jeu drôle, enthousiaste, généreuse. Une camarade de tournée toujours à l’affût de découvertes.

Enfin quand, chassée honteusement du Théâtre du Rond-Point en 2013, je suis allée la trouver au nom des Écrivains Associés du Théâtre pour lui expliquer notre situation, elle n’a pas hésité une seconde « Vous venez ici, je reprends le concept des Mardis Midi et le programme ici au 13, quant aux bureaux des E.A.T, on va se débrouiller, soit on se serre, soit… je vais réfléchir… ». Et quelques semaines plus tard, elle nous avait trouvé un bureau dans le centre d’animation du 13e qui jouxte le théâtre 13/Jardin.

Puis elle a eu l’idée merveilleuse d’associer son magnifique concours des Jeunes Metteurs en scène aux Mardis Midi afin que les jeunes metteuses et metteurs en scène rencontrent dès leurs débuts les écritures contemporaines.

Suite à son décès, Jean-Luc Paliès, metteur en scène qui a dirigé Colette, comme comédienne, à plusieurs reprises, qui a créé plus de 60 auteurs vivants dans les Mardis Midi et dont certains spectacles ont été programmés au 13, a lancé l’idée de donner le nom de Colette Nucci à un des Théâtres 13, idée qui a déjà été reprise et soutenue. Il me semble que les Écrivaines et Écrivains Associés du Théâtre devraient se faire un honneur de soutenir cette idée afin que jamais le nom de Colette Nucci et son œuvre ne disparaissent de nos mémoires et de la mémoire des suivants…

                                                              Louise Doutreligne

                      

 

 

 
                                                
 

 

 

 

Retour aux actualités

Édito du mois de mai 2023

                                           Autrices, auteurs, où êtes vous ?

Arrivée il y a près de huit mois aux E.A.T, perdue dans mon orientation après avoir décidé
d’arrêter le théâtre, je voulais travailler et oublier la scène. Résultat, me voici dans une
association d’auteurs…de théâtre ! On ne peut jamais réellement s’en défaire, n’est-ce pas ?

Étant critique dramatique chez Théâtre Actu à côté de mon volontariat aux E.A.T, je déplore de voir
autant de réécritures ou d’adaptations littéraires, cinématographiques, de documentaires ou
de journaux intimes sur les scènes publiques comme privées. Le théâtre post-Covid serait-il devenu timoré ?

D’expérience, je sais maintenant à quel point les œuvres contemporaines et originales sont
nombreuses, grâce à vous, mais où sont-elles ? Certains auteurs dramatiques, prolifiques,
peuvent jouer cinq de leurs pièces en même temps, monopolisant ainsi les scènes parisiennes
les plus réputées. Même si cela permet à un plus grand nombre de comédiens de jouer, la
prise de risque des théâtres est moindre en pariant sur ces auteurs “super-stars”.

“Autrices, auteurs de tous les pays, unissez-vous ! “, (non je ne suis pas encore
communiste), reprenez le contrôle des scènes et des créations ! Avec la montée des IA
comme ChatGPT, qui peuvent écrire des dissertations en une minute, avec la peur d’investir
dans de nouveaux projets suite au COVID, le risque d’assister à une uniformisation des
pièces et des idées est grand. La recherche de profits et de sécurité ne peuvent faire partie
du nouveau credo des créations. Elles finiront par tuer ce qui est le plus beau dans le
théâtre, l’humanité, le rire face à l’échec, et l’imagination. Je ne crois pas à une disparition
totale du théâtre, cela semble impossible, mais ce qui a fait son essence et son charme
paraît aujourd’hui menacé.

Les E.A.T m’ont fait prendre conscience de mon amour de l’écriture et de toutes ces mains
qui créent la vie du bout des doigts. En feuilletant les catalogues des E.A.T j’ai été
émerveillée de voir tous ces textes et cette diversité d’autrices et auteurs. Je refuse de voir
l’écriture théâtrale s’incliner et se lisser, pas vous ? Et aux incrédules, je répéterai avec
aplomb les mots de Cyrano. “Mais on ne se bat pas dans l’espoir d’un succès / Non ! Non,
c’est bien plus beau lorsque c’est inutile.”
Non ?

                       Maialen Balédent – Service Civique aux E.A.T

 

 

 

 
                                                
 

 

 

 

Retour aux actualités

Édito du mois d’avril 2023

                  Pour un aggiornamento des personnages féminins dans le théâtre jeunesse

Pie débrouillarde, autruche irresponsable, sardine malicieuse, puce trapéziste, tomate ou
fleur, fée ou sorcière, quand elles n’étaient pas poupées, tels s’incarnaient les personnages
féminins du corpus jeunesse des années 70/80. Sous forme humaine, on les retrouvait
paysannes, marchandes de ballons, de fleurs, de glaces, de légumes, servantes, institutrices et
vedettes. Confinées dans le sommeil, à la souillarde près des cendres, enfermées dans une
chambre, une tour, un château fût-il de cristal, chipies pour capter l’attention du Prince, elles
s’inscrivaient dans la généalogie des personnages du Cabinet des fées ou des fables.
Dans les années 90, croulant sous la charge mentale, dévouées aux grands-parents malades,
mères divorcées ou abandonnées, elles ont quand même la force de cuisiner des tartes…Sans
doute leur condition révèle-t-elle un état de fait et une certaine invisibilisation sociale. Mais
peu à peu, les personnages féminins s’extraient des représentations stéréotypées et la
dramaturgie chorale, comme l’absence de nomination des voix permettent l’indifférenciation
sexuelle et genrée, ancrant la fable dans un réel affirmé.
Toutefois l’émancipation est longue. Heureusement, les dramaturges contemporains
s’attaquent aux stéréotypes et les affèteries ou les patterns stylistiques dédiés à chaque genre
explosent dans des langues jaculatoires, drues, poétiques qui disent le monde sans le clôturer.
Les cuisines s’évanouissent au profit des grands espaces, les qualités psychologiques
dévolues aux filles et aux garçons fondent comme neige au soleil. Enfin des êtres humains
dialoguent à égalité, se libèrent chacun de leurs jougs, explorent les confins d’univers
minuscules ou majuscules et élargissent leur désir de vivre leur vie.
Persévérer dans son être peut devenir alors un véritable projet pour les personnages et les
voix du théâtre jeunesse. Ainsi que pour leurs interprètes.

                  Dominique Paquet – autrice et vice-présidente des E.A.T

 

 

 

 

 

 

 

 
                                                
 

 

 

 

Rejoignez-nous sur nos réseaux sociaux

Restez informés sur l’actualité des E.A.T
en vous inscrivant à notre newsletter